Un nouveau dénominateur commun |
De nos jours, tout type d'espace est matière à territorialités. Parcourez les revues, les journaux, les expositions, vous noterez que l'expression est d'actualité et qu'à chaque semaine suffit ses nouveaux territoires : "territoire de création" (Nova magazine), "Ce territoire de l'intime sur lequel se retourne la révolte" (Art Press), " étendre le territoire de l'art" (propos de Chen Zhen), ... la liste est exhaustive.
Mais pourquoi cet excès de territoires ?
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"Vivre, c'est passer d'un espace à un autre, en essayant le plus possible de ne pas se cogner."
Georges Perec, Espèces d'espaces
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Si le territoire s'impose avec force aujourd'hui, et ce, dans tous les domaines possibles, c'est qu'il semble refléter une certaine idée contemporaine : celle d'indépendance et d'identités bien affirmées.
D'un point de vue plus concret, il faut bien admettre que nos espaces se territorialisent chaque jour davantage. Au-delà et en-deça des territoires nationaux qui clôturèrent le Monde à coup de colonisations et de frontières à la fin du XIXe siècle, de nouveaux territoires ne cessent de se créer partout : autant à travers un processus de division (à l'intérieur des communautés nationales, dans les régions, les départements) qu'à travers la fédération d'états et de groupements économiques.
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Depuis une trentaine d'années, l'assouplissement des frontières nationales et économiques, ainsi que le déploiement des télécommunications, ont certes ouvert la voie aux échanges à vaste
distance et au métissage
culturel. Mais derrière
ce mouvement d'ouverture, la question du territoire reste omniprésente. Il devient de plus en plus difficile d'échapper au contrôle : non seulement la Terre, mais l'espace marin et aérien font l'objet de découpages multiples. La mesure et le calcul règlent la géographie du monde, qui devient de plus en plus étroitement emmaillotté, administré, territorialisé.
Sur le plan géographique,
c'est comme si l'apparence d'une nature vaste et illimitée n'était
en fait qu'une sorte d'illusion, un effet du point de vue restreint qu'offre
la vision humaine. Car à plus grande échelle, cette nature
est jalonnée de part et d'autre par toutes sortes de conventions.
L'époque des grandes conquêtes terrestres est loin derrière nous.
Aujourd'hui, les territoires ne sont plus
isolés les uns des autres comme auparavant. Les espaces marins qui
séparaient autrefois les continents ou les paysages accidentés
qui confinaient les pays, ne font plus obstacle aux communications : connectés
de toute part, les territoires se sont rapprochés, ils se sont
même multipliés et s'entrechoquent de plus en plus.
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